Au Ghana, la production agricole repose sur l’utilisation de semences hybrides et l’épandage d’engrais chimiques. Le Coordinateur national de la Ghana National Sesame Business Farmers Association préconise donc d’adopter des pratiques agroécologiques dans la filière du sésame afin de rendre l’agriculture durable.
Grain de Sel (GDS) : Quels sont les défis auxquels fait face le secteur agricole au Ghana ? Qu’en est-il de la filière du sésame ?
Amoah Clifford (AC) : Au Ghana, ce sont la faible capacité des petits producteurs, le manque d’infrastructures agricoles et l’accès limité aux opportunités de marché qui posent le plus de soucis. Les producteurs sont nombreux, mais ils perdent beaucoup d’argent car leurs denrées finissent parfois par pourrir dans les champs. De plus, leurs méthodes de production ne sont pas durables, car le sol étant peu fertile, ils dépendent excessivement des engrais chimiques. Du coup, les coûts de production augmentent et les terres se dégradent.
La filière du sésame est encore à un stade précoce et les données de production sont limitées. Elle bénéficie peu du soutien du gouvernement et manque de dispositifs de nettoyage du sésame. Le Nord du Ghana et certaines zones des régions Oti et Bono-Est sont propices à la culture du sésame. En 2013, l’organisation de développement international SNV a engagé des agriculteurs pour produire du sésame comme culture de rente. Le projet s’est révélé concluant et a été étendu à d’autres zones de la région Nord. Il devenait alors crucial d’avoir une association de producteurs axée sur la filière du sésame afin qu’elle puisse être développée et renforcée : la Ghana National Sesame Business Farmers Association est née en 2015. La GNSBFA prône l’adoption de pratiques agroécologiques dans la culture du sésame. Nous avons identifié des variétés pouvant être cultivées en rotation avec le sésame, comme le sorgho ou le millet, et les producteurs ont été formés à l’agriculture de conservation, où les résidus de culture fournissent de la matière organique et améliorent la qualité du sol. Ils sont encouragés à planter du sésame et des arachides, du niébé ou d’autres légumineuses sur la même parcelle.
GDS : Quelles politiques le gouvernement du Ghana met-il en place pour l’agroécologie ?
AC : Il n’existe pas de politique agroécologique pour le moment. Le gouvernement considère que l’agriculture moderne repose sur l’utilisation de semences hybrides et d’engrais, de pesticides et d’herbicides chimiques. En 2019, dans le cadre de son programme de subventions, il prévoyait de dédier 400 millions de cédis ghanéens à l’achat de 300 000 Mt d’engrais chimiques et 200 000 Mt d’engrais biologiques. De plus, le programme comporte des lacunes qui engendrent la vente illégale des engrais à d’autres pays, comme le Burkina Faso ou le Togo (p 17). Si l’intensification de l’agriculture au Ghana est généralement encouragée, certaines parties prenantes du ministère de l’Agriculture soutiennent toujours l’adoption de pratiques agroécologiques.
GDS : Comment le programme national de subvention des engrais a-t-il affecté vos activités ?
AC : Le gouvernement fait quelques efforts en mettant en avant les engrais biologiques au travers de son programme de subventions, mais en parallèle, ses campagnes encouragent les producteurs à recourir aux engrais chimiques afin d’augmenter leur rendement et leur revenu. Ces engrais font l’objet de subventions élevées et sont vendus aux producteurs à très bas prix. C’est pour cette raison que l’agroécologie peine à se déployer : beaucoup de producteurs optent pour les engrais chimiques, même s’ils reconnaissent les bénéfices qu’elle apporte en matière de santé et d’environnement.
GDS : Que fait la GNSBFA pour l’agroécologie ?
AC : Il fallait d’abord faire des recherches sur le volet pratique de l’agroécologie. Nous avons pris contact avec les producteurs en vue de les dissuader d’utiliser des engrais chimiques. Nous proposons des solutions alternatives, comme l’agriculture climato- intelligente, et nous les sensibilisons aux avantages qu’elle procure, comme la baisse des coûts de production. Nous avons réalisé qu’il y avait un besoin en plaidoyer ; le nôtre s’effectue à l’échelle des régions et des districts. Nous orientons plusieurs services vers une plateforme commune afin de débattre de l’agroécologie et de son intégration à leur plan de développement à moyen terme. Nous nous réunissions chaque année et nous échangeons avec les producteurs et apprenons sur le terrain. Nous avons ainsi établi une ferme agroécologique pilote. Nous pensons que prôner l’agroéconomie est le seul moyen de rendre l’agriculture durable pour les petits producteurs. La GNSBFA appelle le gouvernement du Ghana à considérer la filière du sésame comme une aubaine à inclure à ses politiques agricoles.
Clifford Amoah Adagenera est le Coordinateur national de la Ghana National Sesame Business Farmers Association. La Ghana National Sesame Business Farmers Association (GNSBFA) est une organisation faîtière axée sur les systèmes de production agricole. Elle déploie une stratégie qui cible la filière du sésame et se veut une structure de plaidoyer.