Déterminants de la qualité et de la sécurité sanitaire des denrées animales et d’origine animale
En Afrique subsaharienne, l’offre et la demande croissante en protéines animales (viandes, lait, œufs et produits dérivés…) entraînent des changements dans les habitudes alimentaires et contribuent de façon significative à modifier les systèmes de production et de distribution des Denrées animales et d’origine animale (DAOA). La qualité et le prix y apparaissent comme les principaux facteurs de compétitivité sur les marchés formels et informels. Dans ces espaces, les transformations trouvent leurs fondements dans la recherche de produits meilleur marché et de l’équilibre nutritionnel d’une population souvent désinformée sur les normes de qualité.
Qualité dans les différents systèmes de production
Divers systèmes d’approvisionnement des DAOA se croisent entre les secteurs formel et informel. Il s’agit des systèmes extensifs, intensifiés et d’importation. Des dangers physiques, chimiques et microbiologiques existent dans chaque système mais les risques sanitaires varient suivant la forme du marché, la nature du produit, les pratiques des consommateurs et leur état physiologique. Les études récentes ont montré que quelque soit le secteur, des problèmes de qualité sont certains. Dans le système extensif, en l’absence de bonnes pratiques d’hygiène, d’une bonne inspection et d’un traitement adéquat, les résidus chimiques, les zoonoses et les toxines secrétées par les agents pathogènes sont entre autres les principaux dangers à craindre. Dans les systèmes intensifiés et le secteur d’importation, en plus des dangers mentionnés ci-dessus, on décèle des cas évidents de fraudes.
La pauvreté oriente la majorité des consommateurs vers des produits de moindre qualité et les rend très vulnérable aux risques. L’enjeu de la qualité est donc important puisque qu’il fait intervenir le prix et la maximisation du profit dans le marché au détriment de la santé des consommateurs.
Qualité, risques sanitaires et promotion du marché
Si le secteur informel où coexistent des technologies traditionnelles et modernes assure bien son rôle de réponse à la demande en protéines, une conséquence immédiate est l’émergence des pratiques (fraudes) peu ou pas respectueuses des normes de qualité et d’éthique commerciale. L’incapacité de l’Etat est patente dans les domaines d’adaptation des modèles de réglementation, de régulation et de contrôle des produits locaux et importés, les efforts étant portés sur les produits d’exportation à forte valeur ajoutée (ex. poisson). Les évidences sur la mauvaise qualité nutritionnelle et microbiologique des DAOA apparaissent donc comme une conséquence de l’insuffisance des stratégies et politiques de promotion de la qualité surtout dans le secteur informel où 60% à 80% d’échanges se déroulent. Dans ce secteur, la perception et la représentation de la qualité des produits dépendent non seulement de la présentation, du volume, de l’origine mais aussi du statut socio-économique du consommateur. Ces facteurs motivent de manière significative leurs choix. Les propos d’un consommateur illustrent bien cela : «Qualité moi s’en fou, moins cher moi ça préfère»
Sur le plan de la santé publique, l’on dispose peu ou pas de bases de données cliniques et sanitaires permettant de renseigner sur l’impact de la qualité des DAOA sur la santé des consommateurs.
Options d’amélioration de la compétitivité qualité-prix
Les producteurs améliorent la qualité des produits en s’adaptant au contexte de changement progressif des conditions du marché et des incitations institutionnelles et financières (formation aux bonnes pratiques et accès au crédit). La qualité chez le producteur n’est donc pas perçue du point de la santé mais en tant que facteur d’accès au marché. Par contre si la qualité et les risques qui en découlent sont gérés dans une perspective de l’accès sécurisé au marché, cela pourrait de manière indirecte contribuer significativement à l’amélioration de la qualité et à une atténuation des risques commerciaux et sanitaires. Une étude de cas au Mali avec un partenariat public-privé illustre bien l’approche intégrée du marché à la qualité où le «crédit à la production de lait» est payé en « lait de qualité » à la coopérative. Les bénéfices générés sont réinvestis dans le système sous la forme du « business social ». La surproduction avec les risques de pertes, les exigences des consommateurs urbains sur le plan qualité et prix ont poussé les membres de cette coopérative à adopter des technologies simples et de bonnes pratiques de transformation laitière pour offrir du lait très compétitif. Cette «success story» est sous-tendue par la modestie des investissements, l’accès des acteurs aux différents services et la formation à l’autogestion de la qualité, l’information sur les exigences et les attentes du marché.
Nouvelles approches de soutien aux initiatives d’amélioration de la qualité
Les normes de qualité sont des instruments qui contribuent à l’amélioration des performances des filières de production animale. Loin d’être des normes au rabais, elles devraient se mettre en adéquation avec le secteur informel.
Les communautés sont le premier maillon d’un système de surveillance et de contrôle intégrées de la qualité. Le lien entre l’homme, l’animal et l’environnement, base du système de production, est encore beaucoup plus étroit et rarement pris en compte dans la qualité des produits et l’analyse des risques. Sur le plan général, le concept «Santé unie» ou «One health» prend en compte de manière systémique les aspects de production, de santé publique, de coût-efficacité et de promotion des moyens d’existences des acteurs. Au plan spécifique, suivant la nature des produits et le marché, l’introduction de l’analyse participative des risques qui intègre différents outils (HACCP, OIE, Codex alimentarius) peut certainement promouvoir la conscience de la qualité. Les tentatives de l’UEMOA dans la gestion de la qualité méritent d’être accompagnées par les chercheurs et les acteurs des filières.