Grain de sel : Quelle est l’histoire de la création de l’Inader ?
Thierno Bah : Je viens moi-même de l’Inades Formation en Côte d’Ivoire, où j’ai travaillé pendant 20 ans à Abidjan, puis à Bouaké, où je travaillais sur l’appui à l’installation des jeunes déscolarisés en milieu rural. J’ai alors pensé créer un tel centre en Guinée forestière à Nzérékoré, une région en grande difficulté, où, notamment sur le plan institutionnel, rien n’existait alors. Nous avons soumis le projet sur le thème de l’installation des jeunes ruraux déscolarisés à l’Union européenne un projet pour 4 ans initialement : 2000-2004. On dit que l’Inader est un bébé « né déjà grand », car fortement appuyée par l’Inades.
L’Inader apporte un Appui aux dynamiques organisationnelles paysannes (Adop), sur le même modèle que celui développé par l’Inades. Cette approche a pour but, dans l’appui aux organisations paysannes, de faire l’analyse du contexte aux plans international, national et local pour mieux en identifier le potentiel. Ensuite, un bilan de l’organisation est fait, et un travail est amorcé afin de clarifier une « vision » sur 4-5 ans. Ainsi, les défis à relever sont identifiés, des actions et activités sont précisées, de même que les moyens nécessaires à leur mise en oeuvre et les partenaires possibles. Quand les OP ont leur plan, elles organisent une table ronde avec les autres acteurs du milieu. Cet appui a par exemple été mené pour le Fouta Djalon en 2004-2005.
GDS : Comment fonctionne l’Inader ?
TB : Aujourd’hui, l’Inader, c’est 50 personnes, dont 20 salariés permanents. Tout récemment, le siège a été transféré à Conakry, du fait d’importants problèmes de communication.
Deux axes stratégiques sont définis pour l’ensemble du pays : appui au leadership engagé (bonne gouvernance, structuration, formation des leaders) ; maîtrise de l’environnement économique (commercialisation, filières).
Nous avons aussi d’autres actions : appui à l’élevage en moyenne Guinée, appui à l’installation des jeunes à Nzérékoré. Dans cette même zone, s’est implanté le projet pour la promotion des organisations paysannes (Promopa). Appuyé par la Coopération française, c’est ce programme qui a abouti à la création de la Confédération nationale des organisations paysannes de Guinée (CNOP). De 2000 à 2006, 3 régions ont accueilli des Centres d’appui aux organisations professionnelles agricoles. L’Inader a été désigné comme opérateur pour deux régions : en Guinée forestière et à Kankan.
Un projet est en cours pour l’appui aux OP féminines en Guinée forestière. Il s’agit surtout de maraîchage, mais aussi de transformation, de cuisine de l’attiéké à l’ivoirienne, saponification, etc. En ce moment nous travaillons enfin beaucoup sur la commercialisation : sur la banane notamment (cf. travaux en lien avec Inter-réseaux) connaissance des marchés, recherche de débouchés. Nous souhaitons mettre en place une fédération des producteurs de banane de Guinée forestière. Nous souhaitons aussi mener un programme d’alphabétisation des producteurs pour faciliter le pesage par exemple.
GDS : Quel a été l’effet des interdictions d’exportation ?
TB : Au départ tous les produits d’exportation ont été interdits. Concernant la pomme de terre, les actions menées par la Fédération des paysans du Fouta Djallon (FPFD) ont stoppé le gouvernement. Il faut dire que la Fédération est puissante en Guinée. Pour la banane, ce fut moins évident. Le secteur est moins bien organisé, la production est plus locale. Des ateliers, rencontres ont été organisés à Nzérékoré, pour que les exportations, fréquentes vers le Liberia, la Sierra Leone ou le Mali puissent reprendre leur cours. Aujourd’hui l’interdiction, si elle est toujours en cours officiellement, s’est assouplie.