Dans beaucoup de pays d’Afrique, la terre et les ressources naturelles constituent aujourd’hui, la première richesse des paysans et des éleveurs. Le foncier remplit des fonctions tellement cruciales pour la survie des populations rurales qu’il peut conduire à de graves conflits qui divisent familles, communautés, et pays. Bon nombre de guerres en Afrique ont ainsi eu une dimension, sinon une origine foncière, comme dans la région des Grands-Lacs où le foncier a été un facteur déterminant des conflits violents qui ont marqué la région depuis près de 20 ans. En 2012, quatre ans après une crise alimentaire mondiale majeure dont on espérait qu’elle réveille les consciences sur la nécessité de soutenir les agricultures familiales, qu’observe-t-on ? Une pression foncière qui s’accélère notamment en Afrique, par des mouvements d’appropriations massives des terres à la faveur d’acteurs économiques nationaux et internationaux, et au détriment des droits des producteurs ruraux. Les réformes foncières initiées à la fin des années 90 dans de nombreux pays d’Afrique, ont permis de réelles avancées dans le sens d’une plus grande reconnaissance et prise en compte des droits fonciers des populations locales. Mais dans un contexte, où la population s’accroît rapidement, où les terres fertiles restent limitées en surface voire se dégradent, et où la demande extérieure de terre s’amplifie, les processus en cours sont encore fragiles.
Devant ces enjeux forts, ce numéro de Grain de sel cherche à briser certains préjugés et à réaffirmer certaines vérités. Citons-en quelques-unes : l’Afrique n’est pas une réserve de terres sans droit ; il existe des formes d’appropriation et d’exploitation qui ne sont en rien des investissements agricoles ; délivrer des titres de propriété privée à tous les paysans n’est pas forcément une solution pour sécuriser leur accès à la terre ; conduire des réformes foncières n’implique pas seulement un travail sur les outils techniques et juridiques, mais aussi et d’abord des débats associant toutes les composantes de la société, etc.
Six ans après la sortie d’un Grain de sel consacré au foncier, Inter-réseaux, le Comité technique « Foncier et développement » de la Coopération française et le Hub Rural, partenaires pour la réalisation de ce numéro, ont choisi un fil directeur : le renouveau des politiques foncières face aux grandes évolutions et aux enjeux du développement de ce début de siècle. La nécessité de réglementer l’accès aux terres et de sécuriser les droits fonciers des paysans en Afrique de l’Ouest étant largement admise, il reste maintenant à élaborer les réformes foncières associant les paysans et les éleveurs, et à mobiliser les moyens pour les mettre en oeuvre avec eux dans la durée.
Le Hub Rural
Sans équivalent en Afrique, le Hub Rural est un outil commun au service des acteurs du développement rural et de la sécurité alimentaire en Afrique de l’Ouest et du Centre, principalement les institutions publiques nationales et régionales, les organisations professionnelles agricoles et de la société civile. Une grande particularité du Hub Rural est qu’il est gouverné par ces différentes catégories d’acteurs, qui lui ont confié une mission d’intérêt général, porteuse de bénéfices individuels pour chaque catégorie d’acteurs et d’un bénéfice collectif pour les communautés régionales : améliorer le dialogue sur les politiques et les programmes, contribuer à leur cohérence, à leur pertinence et à leur mise en oeuvre effective, dans des contextes en profonde mutation. Pour en savoir plus : http://www.hubrural.org
Le Comité Technique Foncier et Développement
Réunissant experts, chercheurs, et responsables de la Coopération française, le Comité technique « Foncier et Développement » est un groupe de réflexion qui apporte, depuis 1996, un appui à la Coopération française en termes de stratégie et de supervision d’actions sur le foncier, en réseau avec de nombreux acteurs internationaux. Il compte aujourd’hui une trentaine de membres aux approches très diverses en termes de disciplines et de compétences qui travaillent au sein des principales institutions de recherche, d’enseignement, d’expertise et de coopération sur le foncier et ses questions connexes, dans une variété de pays et de continents. Sous l’égide du MAEE et de l’AFD, ce groupe assure une veille et accompagne les acteurs des politiques foncières dans leur diversité à maintenir le cap des réformes en marche. Il met à disposition de nouvelles analyses, références et repères utiles au pilotage des réformes. Il appuie la promotion et la défense d’approche fondée sur la reconnaissance des droits locaux dans les débats internationaux. L’ensemble de ces travaux sont disponibles en version intégrale sur le portail http://www.foncier-developpement.org