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publié dans Ressources le 29 juin 2012

Polémique au Bénin autour de la subvention de l’État sur le prix de l’engrais

Alain-Marie NOUNAGNON

CotonOrganisations interprofessionnellesBénin

Un des problèmes soulevés par les cadres du Ministère de l’Agriculture, de l’Elevage et de la Pêche (MAEP) pour alimenter la crise qui secoue depuis mars 2012 la filière coton du Bénin est la subvention accordée par l’Etat sur le prix de l’engrais au titre de la campagne 2011-2012. En effet, le prix offert par les deux sociétés adjudicataires [[Pour être définitivement retenu comme adjudicataire, la société classée deuxième et qui obtient 40% du lot doit accepter de s’aligner sur le prix de la société classée première dont le prix est forcément le meilleur.]] du lot 1 [[L’appel d’offres comporte 2 lots. Le Lot 1 concerne les engrais et le Lot 2 concerne les produits phytosanitaires]] (engrais) – DFA pour 60% (+/-10% de la quantité totale prévue) et CAI pour 40% (+/-10%)- était 397,53 F CFA/kg (y compris les frais d’approche). Ce prix a été jugé trop élevé par les producteurs qui ont sollicité le Gouvernement, alors en pleine campagne pour les élections présidentielles, pour obtenir l’engrais à 220 F CFA/kg.

Accédant à la demande des producteurs, le Conseil des Ministres [[Voir extrait du conseil des Ministres dans AIC-Infos N° 47 de Février 2011]] en sa séance extraordinaire du 29 Janvier 2012 a homologué le prix de 220 FCFA/kg pour l’engrais, ce qui signifie qu’une subvention de 177,53 F CFA/kg a été accordée par le Gouvernement sur les 60.000 tonnes d’engrais coton prévues pour la campagne 2011-2012. “Il faut remarquer que l’engrais n’est pas le seul intrant coton qui aura été soutenu pour le compte de la même campagne” a déclaré le Secrétaire Permanent de l’AIC. En effet, pour cette même campagne, l’insecticide Tihan 175 O-TEQ recommandé pour les deux premiers traitements du cotonnier a été livré gratuitement aux producteurs, ce qui représente un soutien d’environ 1,9 milliard francs CFA entièrement pris en charge par l’Interprofession dans le but d’une meilleure utilisation de ce produit.

Contre toutes attentes, le produit Tihan 175 O-TEQ [[Le Tihan 175 O-TEQ est un produit phytosanitaire pour lutter contre les ravageurs du cotonnier en particulier l’insecte le plus redoutable Hélicoverpa armigera. Le grief ici est que ce produit a été jugé peu ou pas du tout efficace par ceux qui accusent l’AIC. Pourtant, tous reconnaissent que le coton produit avec entre autres ce produit est de très bonne qualité]] a été le premier grief porté par les cadres du MAEP contre l’Association Interprofessionnelle du Coton (AIC). Selon les déclarations faites par M. Ousman AFFO, Responsable Communal pour la Promotion Agricole (RCPA) de Bembèrèkè, “le produit n’est pas efficace contre l’Hélicoverpa armigera qu’il est supposé contrôler”. Cependant, a reconnu le chef du Service Classement de l’AIC, M. Amadou SOULE, “Les standards de la gamme supérieure: Kaba/S et Kaba représentent 70% de la production totale de fibre au titre de la campagne 2011-2012, ce qui signifie que le coton graine livré aux usiniers est de meilleure qualité” et pour Samuel VODOUNNON chercheur entomologiste, agent retraité du Centre des Recherches Agricoles Coton et Fibre (CRA-CF) “la qualité du coton graine est intimement liée à l’efficacité ou non des produits de traitement“.

Le second grief porté contre l’AIC était la gestion de la subvention sur l’engrais. Le premier objet de la polémique était le décaissement de la subvention par la Bank Of Africa (BOA) sur la base d’une convention tripartite signée par le Gouvernement représenté par le Ministre des Finances, le Directeur Général de la BOA et l’Administrateur de la CSPR-GIE pour le compte de l’AIC. Selon le communiqué du conseil des Ministres, le Ministre des finances n’aurait pas dû autoriser le décaissement de cette somme sans avoir soumis le dossier à l’appréciation du Gouvernement. Ce faisant, elle a endetté l’Etat au profit d’un petit groupe et comme sanction, elle a été limogée. Le deuxième objet de cette polémique portait sur la quantité d’engrais utilisée en lien avec le faible niveau de production. Pour les cadres du MAEP qui alimentaient cette polémique, “les 63.476 tonnes d’engrais utilisées pour la campagne correspondent à 317.000 ha à raison de 200 kg/ha alors que les superficies réellement emblavées au titre de la campagne sont 209.038 ha“. Ainsi, il se dégage un gap d’environ 108.000 ha qui permet à l’AIC de percevoir en trop 4 milliards francs CFA. C’est pour ce montant que les premiers responsables de l’AIC à savoir : le Président, M. Mathieu ADJOVI, le Vice Président, M. Patrice TALON, le Secrétaire Permanent, M. Narcisse DJEGUI et l’Administrateur de la CSPR-GIE [[CSPR-GIE : Centrale de Sécurisation des Paiements et de Recouvrement]], M. Roger Bruno LOKOSSOU ont été gardés à vue pour 48 heures au Commissariat Centrale de Cotonou. Interpelé sur ce gap, M. Narcisse DJEGUI déclare que “c’est aujourd’hui que les collègues du MAEP ignorent que le coton est une culture qui s’intègre dans une exploitation où il y a aussi le maïs et d’autres spéculations vivrières qui dépendent toutes du crédit intrants accordé seulement pour le coton

D’autres griefs non moins importants comme la quantité de coton graine produite ont été versés au dossier pour accentuer la polémique qui s’est enflée début Mars pour aboutir, le 10 Avril 2012, à la décision du Conseil des Ministres qui suspend l’Accord Cadre [[L’Accord cadre est homologué par le tribunal de première instance de Cotonou]] signé entre l’Etat et l’Interprofession le 12 Janvier 2009 pour une période de 10 ans et confie la gestion de la campagne cotonnière 2012-2013 à un comité transitoire.

Pour l’instant, on s’en tient à la décision du Gouvernement de confier la gestion de la campagne 2012-2013 à un comité transitoire. L’Accord cadre étant un document contractuel homologué au tribunal, sa suspension ne saurait être prononcée par une partie sans en aviser l’autre. Un recours a été déposé auprès de la Cour Constitutionnelle qui ne tardera pas à se prononcer.

Alain-Marie NOUNAGNON

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