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publié dans Ressources le 23 juin 2010

Entretien avec Boukary Ouangraoua, Cadre formateur à l’Institut africain pour le développement économique et social (Inades) au Burkina Faso

Boukary Ouangraoua/Fanny Grandval

Leaders paysan.ne.sOrganisations de producteurs et de productricesBurkina Faso

Entretien réalisé par Fanny Grandval (Inter-réseaux – Grain de sel) à Niamey en juin 2010.

Grain de sel (GDS): Comment se passe le renouvellement des leaders dans les OP ?
Boukary Ouangraoua (BO) :
Il y a des avantages à être leader : on est souvent en atelier, on est souvent sollicité, on est au courant de tout, et rien que de détenir l’information, cela fait qu’on occupe une place stratégique ! Tout cela fait que nos responsables d’OP agissent parfois comme nos chefs d’Etat, ils font en sorte de verrouiller les statuts de l’association. Même si ce qui est fixé par l’organisation c’est 2 mandats non renouvelables, au bout des 2 mandats, certains leaders vont tout faire pour rester ! Il y a un célèbre leader au Burkina qui, après avoir épuisé ses 2 mandats, lorsque les journalistes lui ont posé la question au cours d’une interview de savoir s’il allait rebeloter, leur a répondu que les textes l’en empêchaient mais que s’il avait pu, il aurait tout fait pour rester. Certains leaders font tout pour créer la pensée unique. Ils s’entourent de proches dans le bureau, font en sorte que ce soit leur femme, leurs enfants, leurs neveux pour avoir beaucoup de voix lors du renouvellement des instances. Parfois même il n’y a même pas de renouvellement des instances, souvent c’est par méconnaissance, parfois aussi parce que le leader n’a pas intérêt à ce que tout soit fait dans les règles de l’art car il aurait alors moins de marge de manoeuvre.

GDS : Quel est selon vous le rôle des salariés dans les OP, par rapport à celui des leaders ?
BO :
L’OP peut avoir des programmes pour lesquels elle est obligée de recruter des salariés qui connaissent le domaine et peuvent faire le travail. Ces techniciens conseillent les leaders pour les aider à bien faire les choses mais ils peuvent être mal vus de l’OP, car les paysans ne trouvent parfois pas normal de payer une somme exorbitante pour quelqu’un qui a un certain niveau d’étude. Ils trouvent son travail insignifiant et pensent qu’eux même auraient pu le faire. Parfois ils sont tentés de faire le travail à la place du technicien et cela pose des problèmes.

GDS : Comment se constituent les OP et comment sont alors choisis leurs leaders ?
BO :
Les situations sont disparates. Il y a des moments où les groupements naissent d’un désir d’être plus fort et de surmonter un problème commun. Certaines fois, les paysans se regroupent juste pour capter des financements. Une personne qui se sent influente peut décider de regrouper ses frères et sœurs, ses proches, et créée alors une association très puissante. Ils sont tous de la même famille, et du coup il n’y a pas de contestation possible car on ne peut pas mettre en mal les relations familiales. Je trouve que c’est dommage car dans ce cas l’association n’a pas été créée pour le bien de tous mais pour soi même. Il faut aussi que les leaders comprennent qu’ils ne peuvent pas être président à vie. Mais il y a aussi des paysans qui se réunissent car ils sont dans un même domaine, qu’il y a quelque chose à faire ensemble.

GDS : Quelle est la situation des femmes dans le leadership des OP ?
BO :
J’ai travaillé beaucoup plus avec leaders féminins. Le constat est que chez les femmes, généralement, les informations passent plus vite et mieux que chez les hommes parce que les femmes se réunissent plus facilement par exemple au sein de leur association féminine. Même si les femmes sont beaucoup plus ignorantes car socialement elles bénéficient de moins d’instruction, quand les femmes font une activité, elles y mettent beaucoup de sérieux. Le problème des hommes est qu’ils ont plus de besoins et qu’ils s’en créent qui n’existent pas, ce qui les amène à mal gérer. gestion. La plupart des hommes dans notre société, quand on a une femme, on a une maîtresse, donc on augmente son train de vie et pour supporter son train de vie il faut parfois avoir des ressources et pour avoir les ressources, il faut être stratégique et cela joue négativement sur les organisations. Car on met un système de gestion en place avantageux pour les individus mais pas avantageux pour l’OP. Or quand la femme a des besoins, ce sont des besoins réels : son enfant est malade par exemple. Alors que nous, les hommes, il arrive que nous nous fabriquons les besoins, que l’on prenne plusieurs femmes, etc. Tout cela sont des choses qu’on ne dit pas mais qui jouent. Les femmes ont parfois beaucoup de responsabilité dans les organisations, mais elles n’aiment pas la honte, ne veulent pas qu’on les montre du doigt pour dire que telle chose est arrivée par leur faute. Dans le cas des crédits, les femmes sont bons payeurs. Mais les hommes s’en foutent, c’est leurs propres intérêts ou rien. On ne prend pas les risques de la même manière. La femme est plus timorée mais est plus réfléchie.

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