Une nouvelle revue francophone sur la ruralité et les paysanneries, Présences paysannes et rurales (Prépar), a été lancée en mars 2021 par une équipe de chercheurs, journalistes et professionnels. Elle constitue, en soi, un triple pari.
- Le premier est de rendre compte de l’actualité des paysanneries et de la ruralité, sujets peu traités dans la presse ou confinés aux publications scientifiques, techniques ou professionnelles.
- Le second est de s’inscrire d’emblée dans une perspective globale (« pluriverselle ») en abordant, à partir de l’imbrication des échelles d’analyse (du champ aux enjeux mondialisés du commerce agricole ou de la crise climatique), les réalités rurales des pays du Nord comme du Sud.
- Et le troisième est d’ambitionner, derrière des articles adossés à des recherches ou des acteurs de la sociologie rurale, un magazine attractif édité sous format papier, intégrant également des ouvertures culturelles, sur le cinéma ou la littérature en lien avec le rural.
La perspective se veut critique et engagée. Ainsi le premier numéro s’ouvre sur un article d’une militante de la Confédération paysanne au sujet de la convergence paysans-gilets jaunes. Il est suivi d’un billet sur l’héritage politique –chargé- de la cogestion dans l’orientation du modèle agricole français. Le dossier est, quant à lui, consacré aux évolutions de la recherche rurale, laquelle est passée en revue en Europe (France, Espagne, Grèce), au Maghreb (Maroc, Tunisie, Syrie, Egypte) ainsi qu’au Brésil. On y mesure comment, malgré l’ouverture progressive de ses champs d’investigation (pluriactivité, relations ville-campagne, etc.), les espaces institutionnels de la recherche rurale se sont progressivement refermés, quand les pouvoirs politiques ne les ont pas tout simplement réduits au silence. Faut-il, à l’instar de ce que propose Ana Velazco Arranz, trouver d’autres espaces pour maintenir une pensée critique ? Une nouvelle revue peut, à tout le moins, contribuer à la diffusion de cette dernière et ouvrir un espace d’échanges à de nouvelles générations de chercheurs, journalistes ou professionnels. Dans un contexte où, dans le prolongement des questions agricoles après la flambée des prix alimentaires à la fin des années 2000, de nouveaux enjeux ruraux et environnementaux ont émergés et suscitent, avec la pandémie et la crise climatique, un regain d’intérêt citoyen, elle peut permettre à un lectorat élargi et mobilisé de diversifier ses sources d’informations et de réflexions. Pari à suivre ?