Maire de son village en Lorraine, Gérard Renouard est installé depuis 1977 sur une exploitation de 350 hectares (en statut Gaec avec deux associés). Il cultive des céréales et produit lait et viande bovine. Il est président de l’Afdi depuis 2001 (second mandat), en tant que représentant de la FNSEA.
En quoi la manifestation organisée à l’occasion des 30 ans de l’Afdi va-t-elle consister ? Quels en sont les grands enjeux ?
Les trente ans sont un prétexte, une opportunité de se réunir à quelques semaines de Hong Kong. L’idée est de rechercher l’adhésion des grandes organisations paysannes à l’organisation d’un événement nord-sud dans la logique d’une recherche d’alliance face à la problématique de libéralisation à tout va de l’OMC. Sur ce domaine, les craintes sont aussi fortes du côté des pays occidentaux que des pays en développement. Nous avons souhaité réunir des experts, des institutionnels et des responsables agricoles du Sud et du Nord, d’Afrique et de Madagascar. Sur la cinquantaine d’invités, presque tous ont répondu présents à l’appel. Plus que les 30 ans de l’Afdi, je souhaiterais parler de l’événement que nous avons intitulé Hongkong moins quinze, les paysans prennent la parole. 3 tables rondes d’une demi-journée chacune auront ainsi lieu, nous avons souhaité que ces rencontres soient suffisamment longues pour que les débats ne soient pas que des amorces de discussion. Les sujets sont les suivants : – En quoi la mondialisation peut-elle profiter aux pays en développement ? – La souveraineté alimentaire. – Union européenne et pays en développement : partenaires ou concurrents ? Sur ce troisième point, notre avis est que la condamnation de la politique agricole commune est un combat d’arrière garde, le fond de commerce d’ONG en mal d’idées qui n’ont pas su évoluer depuis les années 90. Ce qu’il faut c’est construire une politique. Des attaques simultanées de camps opposés ne peuvent faire évoluer la Pac dont nous sommes persuadés qu’elle doit évoluer. Voilà notre objectif dans les réunions à venir : on réunit des gens pour construire des lignes de force communes, pour mieux résister à la vague hyper libérale de l’OMC. Même si nous ne parvenons pas dès lors à un accord ça n’est pas très grave ; ce qu’il faut avant tout c’est construire une capacité de dialogue.
S’il n’y avait que deux actions de l’Afdi à retenir au cours des 30 dernières années quelles seraient-elles ?
Pour ce qui concerne l’Afdi à proprement parler, nous avons connu beaucoup d’évolutions au cours des 30 dernières années. Nous ne sommes plus seulement des creuseurs de puits. On pourrait dire que nous sommes désormais plus soucieux de développement que de charité, même si tout est nécessaire. Sur les 30 dernières années, s’il ne fallait retenir que quelques souvenirs, je mentionnerais les suivants : – une démarche généreuse, suite à la première grande sécheresse au Sahel ; – la capacité de prendre le virage de la professionnalisation, avec nos partenaires institutionnels, ONG, OPA, ministères. Nous avons assisté, mais aussi accompagné l’émergence d’OPA locales qui se sont épanouies au niveau national pour atteindre un impact international. Pour cela l’action internationale a eu un effet croissant. – la capacité de permettre aux paysans français de mieux comprendre les agriculteurs du Sud. Les différentes missions dans les pays du Sud, l’accueil au Nord d’agriculteurs du Sud, tout cela a permis à nombre d’entre nous d’ouvrir les yeux et de mieux comprendre la différence et la richesse des échanges. Le regard sur l’autre a changé, les agriculteurs de l’Afdi ont, je dois dire, une meilleure compréhension des problèmes de nos sociétés. Je pense par exemple à l’actualité, avec les émeutes en banlieue. une capacité de remise en cause. Notamment vis-à-vis de nos partenaires du Sud. Les concepts d’écoute, de respect, de partage ont un véritable sens.