L’Afrique de Sarkozy – Un déni d’histoire. J.-P. Chrétien (dir.)
Le décryptage du « discours de Dakar » (dont le texte intégral figure en annexe) apporté par ce petit livre va beaucoup plus loin que la critique faite jusqu’alors. Contre l’Afrique « qui ne connaît que l’éternel recommencement » et « l’homme africain qui n’est pas assez entré dans l’histoire », chacun des cinq auteurs, rappelle à sa façon « la dimension historique dans laquelle s’inscrit le destin, ancien et présent, des peuples africains » et dénonce « cette régression culturaliste et différentialiste, ressentie comme la récurrence d’un racisme anti-noir »… J.-F. Bayart montre, à travers « les propos dakarois… littéralement stupéfiants » que « les appels vibrants en faveur de la refondation franco-africaine, durant la campagne électorale » dissimulaient une grande continuité. J.-P. Chrétien, dans « l’Afrique, un village sans histoire ? » trace les grands moments de l’histoire de l’Afrique, depuis la préhistoire. « L’opinion française vit au rythme d’un balancier entre la culpabilité coloniale et l’arrogance humanitaire »… Selon A. Mbembé, l’Afrique reste pour les Français « un intarissable puits aux fantasmes », dont on ne soulignera jamais assez les dimensions politiques et économiques et dont on ne dira jamais assez qu’il continue d’informer jusque dans le présent nos représentations des Africains, de leur vie, de leur travail et de leur langage. P. Bailley explique notre ignorance en analysant les programmes scolaires sur vingt ans : « L’Afrique n’apparaît qu’en filigrane et toujours sous l’angle de l’histoire de la France et de l’Europe ». Enfin, I. Thioub nous offre en contraste l’histoire vue d’Afrique et la synthèse des courants et débats de l’École historique de Dakar depuis une cinquantaine d’années. Au-delà de l’analyse décapante d’un discours révélateur de nos visions partiales et de nos politiques au mieux paternalistes, c’est à un changement radical de notre regard sur l’historicité des pays africains, sur notre place, modeste, dans le monde et sur la nécessité de nouveaux rapports franco-africains, simplement « normaux », entre semblables et égaux, auquel nous invite ce livre précieux.
(Recension : D. Gentil). Éditions Karthala (Disputatio), juin 2008, 204 p., 18 euros, ISBN : 978-2-8111-0004-9
La crise alimentaire au Niger. Afrique contemporaine nº225
Ce numéro d’Afrique contemporaine permet de comprendre les tenants et les aboutissants de la crise alimentaire de 2004-2005 au Niger. Première originalité, ce dossier a été en grande partie réalisé grâce à un laboratoire de recherche sociologique nigérien. Ceci permet de disposer d’analyses fines des comportements et des réactions à la crise des divers acteurs grâce à des études réalisées dans sept sites. Deuxième intérêt, il présente diverses autres approches du problème comme la gestion de la crise vue du coté des administrations ou la façon dont elle a été traitée par les médias. Surtout il faut souligner la richesse des enseignements tirés de cette crise alimentaire nigérienne, qualifiée de structurelle et ancienne, en particulier sur le plan du fonctionnement des divers dispositifs intérieurs et extérieurs de prévention et de gestion de crise.
Éd. De Boeck, 1er trimestre 2008, 294 p., 18 euros, ISSN : 00020478, Texte intégral disponible en ligne sur http://www.cairn.info
Celle qui plante les arbres. Wangari Maathai
Cette autobiographie constitue un riche et poignant témoignage du parcours d’une femme kenyane, militante féministe qui reçut le prix Nobel de la paix en 2004 pour « sa contribution en faveur du développement durable, de la démocratie et de la paix ». À la tête du Mouvement de la ceinture verte, elle promeut des gestes simples, comme celui de planter des arbres, et mène une lutte acharnée contre la déforestation, se heurtant de plein fouet au régime politique et aux intérêts financiers privés. À travers son histoire personnelle, la petite paysanne des Hautes Terres montre comment une militance s’appuyant sur une solide formation, confortée par une foi qui soulève des montagnes, lui permet de gagner des combats contre le népotisme, la corruption, la peur et l’ignorance.
Éditions Héloïse d’Ormesson, 2008, 382 p., 23 euros, ISBN 978-2-35087-1